C’est par hasard que j’ai découvert le milieu de la gendarmerie grâce au père d’un de mes amis qui était commandant d’une brigade. Il a pu me renseigner sur les questions que je me posais, il m’a fait découvrir de l’intérieur le quotidien d’une brigade autonome.
Pendant mes études de langues étrangères appliquées, je décidai avec le fils de ce gendarme de passer le concours de sous-officier. Nous nous sommes donc préparés ensemble au concours physiquement et intellectuellement.
Je me présente aux premières épreuves écrites. C’est là qu’un gros tri est effectué parmi les 15 000 candidats inscrits, il n’en restera que 2 500 qui pourront poursuivre vers les épreuves orales. Cette première épreuve fut éliminatoire pour mon ami.
Les épreuves suivantes sont les épreuves sportives, quelques semaines plus tard. Ici on mesure votre capacité mentale et votre concentration pendant un effort bref mais très intense. Ce qui servira tout au long de votre carrière, car c’est là toute la difficulté du métier : celle de prendre une décision rapidement qui doit ou peut vous sauver la vie, tout en restant légale et sous un stress énorme.
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Le lendemain du sport, j’ai eu un entretien avec des officiers sur mes motivations et un autre avec un psychologue afin de déterminer mon profil et de le juger stable ou non. Il faut son accord pour continuer.
Exemple de question qui m’a marqué car je me la suis posée par hasard la veille de l’entretien : «Qu’est-ce que cela vous ferait d’avoir une arme sur vous ?» Et c’est là que je me suis dit : «Ça y est là ça rigole plus, là tu es dedans…»
J’ai pu accéder à la dernière étape de sélection quelques semaines plus tard : la visite médicale. Des 2 500 candidats, il n’en restera que 600 environ. Entre le moment où vous passez les premières épreuves écrites et la dernière étape de sélection, il se passe déjà environ 6 mois.
Ensuite arrivent vos résultats, sous forme d’un «bulletin de notes» avec votre moyenne et vos appréciations. Vous savez à ce moment-là si vous êtes pris, mais il peut se passer encore entre 6 mois et 1 an et demi avant d’être convoqué, selon votre classement aux épreuves…
Je reçois enfin cette convocation pour me présenter à l’autre bout de la France et démarrer l’aventure. Pour ma part c’était Chaumont, direction Champagne-Ardenne. J’attaque donc 9 mois de formation pour devenir militaire de la gendarmerie, je ne savais pas vraiment ce qu’était l’armée et je vous avoue que l’écart fut énorme entre ma petite vie étudiante et la première semaine à l’école.
Il y eu des moments très durs, d’autres très sympathiques. Ce qui est important, c’est de ne pas craquer car on vous teste en permanence, jour et nuit. Pour vous décrire l’ambiance, on ne sait pas si notre nuit sera entière pendant plusieurs semaines, on se fait réveiller pour des marches nocturnes ou des virées sportives en pleine nuit avec des scénarios du style : «Madame X a disparu, le colonel de l’école vous demande de faire une battue…» On ne sait ni quand on part ni pour combien de temps.
Bref c’est intense mentalement et physiquement. Les cadres font le maximum pour que le milieu vous déplaise. Leur objectif est de voir votre réaction afin de déterminer si vous êtes capable et prêt à répondre aux obligations d’un militaire.
C’est sûrement dès les premières semaines que naissent les premiers liens amicaux avec les autres. Ce qui est bien, c’est que personne ne se connaît. Nous sommes différents au fond même si on porte le même uniforme et c’est ce qui permet l’entraide : «Je t’aide à monter là-haut et toi tu m’aides à réviser mon cours sur la déontologie de ce matin ?» Les cadres sont aussi là pour nous aider à développer entre nous cet esprit de cohésion.
En seulement quelques semaines, j’ai ressenti un réel soutien de la part de certains camarades de mon peloton. Dans des situations extrêmes, même si le collègue n’est pas votre grand ami, je peux être certain que je peux compter sur lui s’il y a besoin. Les affinités sont alors mises de côté. C’est ce qui fait de nous une force puissante et c’est ce qui nous permet de bien travailler.
Sur le plan personnel, l’école m’a aussi transformé. Ce sont mes proches qui m’ont dit que j’avais mûri, que je suis devenu plus fort mentalement et physiquement aussi. Je suis devenu plus organisé, plus ordonné, plus perfectionniste. Ce sont des qualités que l’on attend chez vous plus tard sur le terrain.
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